Après la désinstitutionalisation, quelles redéfinitions des espaces institutionnels aux États-Unis? Le cas des organisations à but non lucratif spécialisées dans l'intégration sur le marché de l'emploi.
Marie Assaf  1@  
1 : Centre d\'études nord-américaines
Mondes Américains

 C'est aux États-Unis qu'a émergé l'un des principaux mouvements pour la désinstitutionalisation. Dès les années 1960 les personnes handicapées se mobilisent autour d'un projet social et politique, celui de la vie indépendante. Il s'agit de sortir des institutions traditionnelles afin de s'intégrer à la communauté. Un type d'acteur en particulier sert cette transition, les associations à but non lucratif dont les déclinaisons varient (centres de vie indépendants, programmes de réhabilitation professionnelle...). On croise souvent ces organisations aux États-Unis où la délégation de l'action publique et plus spécifiquement des services d'assistance est caractéristique du welfare state. Elles proposent des services aidant à l'intégration (logement, aide au transport, à l'emploi...). Or, malgré leur rôle croissant dans la vie des personnes handicapées depuis les années 1960, ces agences restent peu étudiées. 

Nous proposons ici de présenter des données issues de notre travail de thèse. Nous avons rencontré diverses organisations à but non lucratif de la côte Est étasunienne, spécialisées dans l'insertion des personnes handicapées sur le marché du travail (Young Adult Initiative à New-York, WorkInc à Boston et Trenscen à Washington). Malgré des natures divergentes, elles présentent des caractéristiques communes, dont le maintien d'anciennes formes institutionnelles liées au handicap, comme les centres de jour. Néanmoins, leurs pratiques et discours se veulent en rupture avec le modèle d'institutionnalisation traditionnel. Profondément influencées par la désinstitutionalisation et par le mouvement des droits des personnes handicapées, elles constituent des brèches mettant au coeur de leur action l'agentivité des acteurs et leur émancipation. 

Dans quelle mesure participent-elles dès lors à la redéfinition de l'institutionnalisation (et dans quelle mesure peuvent-elles être considérées elles-mêmes comme des institutions)? En nous appuyant sur une étude au croisement de l'analyse des institutions publiques, de l'histoire du handicap et de la sociologie des organisations (à travers des entretiens menés auprès des agents et des observations participatives), nous chercherons à saisir en quoi ces espaces sont le reflet de l'évolution des formes de l'institutionnalisation aux États-Unis. Bien qu'elles agissent principalement à des échelles micro, elles constituent souvent des espaces nécessaires à l'intégration d'individus marginalisés. Le cas étasunien, de la part nature de son welfare state et l'importance du mouvement pour les droits des personnes handicapées permet de réfléchir aux nouvelles formes de l'institutionnalisation à l'aulne de la désinstitutionalisation. 

 Bibliographie

Baudot PY, Revillard A. (2014). « Handicap et science politique », paru sous le titre « Les savoirs de la science politique » in Charles Gardou (dir), Handicap une encyclopédie des savoirs, Ères/ Connaissances de la diversité, pp 385-397 

Duvoux N. (2015), Les oubliés du rêve américain: philanthropie, État et pauvreté urbaine aux États-Unis, Presses Universitaires de France.

Mansell J., Ericsson K. (eds) (1996), Deinstitutionalization and community living: intellectual disability services in Britain, Scandinavia and the United-States, Springer Science.



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